Les deux Marie Madeleine du Caravage ?

14 janvier 2019

Le Caravage aurait peint une Marie Madeleine dans les mois qui suivirent sa fuite de Rome après le meurtre de Ranuccio Tommassoni le 29 mai 1606. Le peintre s'était alors réfugié sur les terres de ses protecteurs, les puissants princes Colonna, et les sources de première main rapportent qu'à ce moment « il travaillait à un tableau de Marie-Madeleine. »

On a longtemps pensé que l’original avait disparu et on n’en connaissait plus que des copies d’époque.

Mais depuis quelques année l'original disparu aurait été retrouvé. la « Madeleine Klein » a été authentifiée par des experts mème si elle ne fait pas l'unanimmité.

Et puis recemment une autre Madeleine a été authentifiée par Mina Gregori grande spécialiste du Caravage. Elle affirme, à son tour, avoir retrouvé l’original du Caravage: «les tons variés de la chair du corps, l’intensité du visage, les poignets forts et les mains aux tons livides avec ces modulations admirables de couleur et de lumière, l’ombre obscurcissant la moitié des doigts, sont les aspects les plus intéressants et marquants de cette toile. C’est un Caravage.»

«les plis de la chemise sont obtenus d'un seul coup de pinceau, typique du Caravage»

Ce sont ces Marie Madeleine qui sont exposées cote à cote au musée Jacquemert André à l'occasion de l'exposition Caravage

Il y aurait donc deux Marie Madeleine du Caravage plus des copies reconnues comme copies.

L'une, réalisée par Louis Finson (1580-1617), un caravagiste flamand de passage à Naples en 1612, est aujourd’hui conservée au musée des Beaux-Arts de Marseille

Mais bizarement cette copie de Finson n’est pas exposée au coté des deux Caravage authentifiés. Pourquoi ? Ferait-elle de l'ombre aux "originaux"?

Je ne dirai rien du dessin, de la composition, de la couleur en général.

Je voudrais juste attirer l’attention sur un aspect un peu particulier des peintures du Caravage : les drapés blancs. Ils sont nombreux dans ses peintures et ils ont un rôle essentiel dans le clair obscur. Car en effet ils apparaissent toujours très lumineux.

Les parties dans l’ombre légère ne sont pas peintes en gris mais en couleur. Plus précisement en bleu et en oranger sur fond blanc.

Que voit-on? Un blanc étalé à grand coup de pinceau et dans les creux des traces d'oranger, de bleu et de gris bleuté.

Saint Jérome

Caravage pratique donc trois siecles avant Seurat le mélange optique des couleurs

Cela consiste ici à juxtaposer deux couleurs complémentaires, Lorsque le tableau est regardé à une certaine distance, les taches de couleur bleue et oranger ne peuvent être distinguées les unes des autres et se fondent optiquement les unes aux autres. L’aspect visuel obtenu est différent de celui obtenu en mélangeant des couleurs sur une palette et en les appliquant ensuite sur la toile. Le résultat est plus brillant et plus pur car le mélange est réalisé par l’œil et non sur la palette.

La juxtaposition de taches de couleur sur la toile est retranscrite par l’œil du spectateur en un « mélange optique » : les deux couleurs complémentaires sont perçues simultanément comme une nouvelle couleur par l’œil humain: un gris coloré somptueux à la place d'un gris terne.